• Conseillé par
    17 avril 2011

    Après avoir lu le très divertissant « Frey » de Chris Wooding, j’ai eu envie de prolonger l’aventure avec cet auteur et c’est tout naturellement que je me suis tournée vers sa saga la plus connue (et la plus sombre aussi), « La croisée des chemins ». « Les tisserands de Saramyr » en est donc le premier tome et après un début quelque peu poussif, s’est révélée une excellente découverte !


    Kaiku vient de mourir. Elle s’en rend compte et se réveille avec la sensation que quelque chose ne va pas. Comme peut-elle être revenue à la vie ? Sa servante, penchée sur elle, semble y être pour quelque chose. Mais c’est le chaos autour d’elle, des monstres ont envahi sa demeure, et l’heure n’est pas aux questions, il faut fuir ! Seule survivante et protégée par Asara, la servante qui lui a rendue la vie, Kaiku parvient à s’échapper. Sa famille assassinée et un mystérieux masque semblant être la clef de tout, Kaiku décide de mener son enquête afin de réclamer vengeance. Et ses pas la conduiront jusqu’à la cité impériale où un scandale vient d’éclater : la jeune princesse héritière est une « Aberrant », une de ses anomalies de la nature qui naissent avec des pouvoirs terrifiants...Les deux jeunes filles auraient elles quelques chose en commun ?

    Dès le premier paragraphe, on est un peu perdu. Chris Wooding nous plonge dans l’empire de Saramyr sans introduction et nombres de termes nous semblent bien obscurs. Tisserands, Aberrants, Shin-shin,Masques sacrés, le monde construit par l’auteur possède une empreinte propre qui, si elle se révèle originale, égare un peu son lecteur au début du récit. L’acte du tissage est un peu compliquée - cette plongée dans la psyché qui s’apparente à des fils d’araignée que le tisserand se doit de remonter afin de mieux corrompre l’esprit de n’importe quel être humain - et nous donne droit à des passages nébuleux qui tendent à ralentir la mise en place du récit. La mythologie de Saramyr créée par Chris Wooding, m’a d’ailleurs paru quelque peu hermétique, et il m’a fallu un certain temps d’adaptation pour tout comprendre. Passé ce cap, je me suis régalée !
    Les masque sacrés, qui confèrent leurs pouvoirs aux Tisserands, ont la fâcheuse tendance à détruire leur visage et à les mener inévitablement vers la folie. D’où une certaine violence dans le récit, « les tisserands de Saramyr » nous apparaissant comme sombre, inquiétant et tortueux. Un roman digne de la « dark fantasy » à l’image d’un trône de fer, de part sa violence et son univers ténébreux. De plus, le roman possède une touche « asiatique » dans ses décors et ses patronymes (Kaiku, Asara, etc.) qui apporte une ambiance des plus originales au récit. C’est d’ailleurs là, « la » griffe Chris Wooding, cet espèce de mélange des genres qui nous empêche de vraiment situer ses romans : un peu de SF, un touche de Fantasy, un soupçon d’Asie, et nous voilà avec un roman unique et passionnant.

    Car au-delà de sa complexité se cache un roman riche, captivant et surprenant. Cette idée de masques maudits est particulièrement originale et bien pensée, l’univers décrit par Chris Wooding est brillamment construit et finit par empoigner son lecteur qui aura bien du mal à lâcher ce roman. L’ambiance devient électrisante à souhait aux 2/3 du récit et enchaîne les retournements de situation et les coups bas, on ne s’ennuie pas une seconde. La folie des tisserands qui imprègne le récit, exerce une espèce de répulsion-fascination sur le lecteur, qui rêve vite d’assister à leur déchéance et espère une fin heureuse pour les Aberrants (qui paraissent presque sympathiques, finalement). Pourtant, ici, point de « happy end », à l’image de l’ambiance sombre qui se dégage tout au long du récit, la fin n’est pas sans heurts et donne furieusement envie de se jeter sur la suite...